“On est passé insidieusement d’une critique du livre comme “contenant” peu moderne (i.e. en papier, etc.) à une critique du livre comme contenu. Sanger cite notamment des commentaires de geeks affirmant que personne ne lit plus les classiques comme Guerre et Paix [en], considérés comme trop longs et pas intéressants (bref pas assez “modernes”). En parallèle émerge l’idée qu’Internet modifie nos capacités cognitives (tendances à zapper d’un contenu à l’autre sans se focaliser – Is Google making us stupid ? [en]). Le point central derrière cette idée étant que, désormais, toute connaissance est relativement accessible sur le web et donc qu’il est inutile de s’encombrer le cerveau avec des connaissances “inutiles” qui prennent un temps infini à consolider.”
“Au fond, je me demande si cette façon de penser ne marque pas surtout la prédominance de plus en plus importante du génie (au sens ingénierie) sur la science elle-même. La science se retrouve en fait victime d’un double complexe de Frankenstein : d’une part, la créature (la technique) est constamment assimilée au créateur (la science), tout comme on fait souvent la confusion entre le monstre et le nom “Frankenstein”. Le grand public confond ainsi allègrement science et technique, le terme même de “geek” recouvre ces deux réalités différentes de l’académique et du technophile. D’autre part, la technique comme fin en soi tend donc à se substituer à la science, comme la créature se retourne contre son créateur. Les geeks Internet sont à la pointe de ce mouvement en considérant en somme que toute connaissance est réductible à un problème technique, et c’est là l’origine profonde de cet anti-intellectualisme. Souvenons-nous également de cette révélatrice anecdote canadienne. Plus que l’idiocracy, c’est la technocratie qui triomphe.”
Les geeks sont-ils anti “intellectuels”?, commento in francese pubblicato su Matières Vivantes al seguente articolo
Is there a new geek anti-intellectualism? di Larry Sanger